Vous êtes sans doutes nombreux, guitaristes débutants ou fauchés (voir les deux en même temps), à avoir craqué pour cette « sous-marque » de Fender. La masse hautement qualifiée et très proche de l’omniscience qui traîne sur les forums démolit avec un zèle non retenu les squier, parce qu’elles ne sont que de pâles imitations de la grande référence susnommée, parce qu’elles sont accessibles et répandues chez les vulgaires amateurs débutants en mal de repères, ou tout simplement parce qu’elles n’ont pas d’histoire … Sur ce dernier point, j’aimerai te donner à toi, possesseur de ce si joli bout de bois bon marché, quelques arguments à ressortir, juste au cas où.
En vérité, cette marque à une histoire, une histoire simple, certes, mais une histoire qui m’a permis d’acquérir un pure respect pour ce logo. Tout a commencé dans le Michigan, à Battle Creek. Ce nom vous dira peut-être quelque chose, puisque c’est aussi le lieu où ont été inventé les fameux corn flakes, et où habitait M. Kellogg himself (certes, l’intérêt musical de cette information est minime, mais tout de même, sans Corn Flakes, y’aurait jamais eu de Frosties, ha !). Dans la décennie suivant 1860, un immigrant anglais du nom de Jerome Bonapart Squier (le pauvre) s’installe dans la petite ville et y démarre une petite activité d’agriculteur et de cordonnier. Malgré ce deux activités passionnantes et au combien complémentaires, Squier s’ennuie, et décide donc d’apprendre tout seul à fabriquer des violons. Il se révèle plutôt doué pour cette activité, tant et si bien qu’il fini par partir pour Boston où il continuera à fabriquer de magnifiques instruments avec son fils adoptif (qui sera aussi son apprenti) Victor Caroll Squier (notez qu'on a vraiment pas de chance avec les patronymes, dans cette famille). Les violons de Jérôme Bonapart Squier sont aujourd’hui des pièces de collection de très haute valeur, vous voila prévenus : si un violoniste vous sort qu’il a un squier, ne le prenez pas pour un débutant fauché, vous risquez de le vexer.
Le fils Squier va acquérir beaucoup d’expérience aux côtés de son père mais en 1890, il ne résiste pas à l’appel des Corn Flakes et retourne à Battle Creek où il démarrera une activité de production de cordes. La encore, ça fonctionne pas mal, tant et si bien qu’en 1927 il ouvre ne nouvelle usine pour y fabriquer encore et toujours des cordes mais aussi des violons, des banjos et … des guitares. Cette activité perdurera sans faiblesses jusqu’en 1965, l’année où C.B.S rachète Fender qui rachète Squier (darwinisme économique ?).
L’usine originale de Battle Creek sera fermée en 1972 par C.B.S. A partir de 1982, Fender utilise la marque Squier comme nom de "série", placé sous son logo, pour fabriquer des guitares japonaises moins chères et répondre à la concurrence de Tokai Guitars. Le logo Fender en lui-même disparaître très rapidement pour laisser place au gros logo Squier signant ainsi la résurrection de la marque en tant que telle.
Les Squier japonaises entre 82 et 84 sont très appréciées et reconnues pour leur qualité quasi équivalente au reste de la production Fender de l’époque. Squier produit aujourd’hui encore des modèles ‘low-cost’ de la gamme Fender et des guitares exclusives. Si cette marque est terriblement savatée, surtout à cause de son image, je garde en mémoire les mots d’un vieux vendeur vendéen ventripotent, joueur de guitare confirmé et véritable encyclopédie sur pieds, qui me disait que selon lui « la principale différence entre une Squier et une Fender, c’est le prix… ».